Cet ouvrage est le fruit d’un travail interdisciplinaire, mené par des universitaires travaillant principalement en Arménie ou aux États-Unis et soutenu par un centre de recherche de l’Arizona State University. Comme l’explique l’éditeur en introduction, il montre que « la tradition chrétienne arménienne continue d’être distincte, étant profondément et même intimement ‟nationale” » ; en même temps, elle subit quelques expériences typiques des mutations globales actuelles, avec leurs contradictions : « des poussées de désécularisation entrant en conflit avec un progrès profond de sécularisation ; une croissance de transnationalisme s’opposant à un ethno-centrisme fortement articulé » (p. 3).
Il comprend deux parties. La première traite de la situation religieuse en République d’Arménie. Sont étudiées successivement la persistance de l’emprise sur la société du paradigme ethno-religieux promu par l’Église apostolique arménienne ; la motivation des constructions de nouvelles églises et leur signification sociale ; les tensions entre l’enseignement des idées créationnistes dans l’histoire de l’Arménie et celui de la théorie de l’évolution dans les cours de biologie ; la dynamique religieuse post-soviétique, notamment à travers l’essor dans les années 1990 puis le déclin d’un mouvement de laïcs, la Fraternité, née en Cilicie vers 1880 et implantée en Arménie en 1948 ; la manière avec laquelle les communautés évangéliques et pentecôtistes affrontent différemment le défi de leur identité.
La deuxième partie s’interroge sur les diasporas comme « puzzles d’identité » : un premier article traite de l’appartenance aux deux principaux centres religieux d’Etchmiadzin et de Cilicie ; puis sont étudiés successivement : la vénération des saints dans la communauté arménienne d’Istanbul ; la division des arméniens du Liban entre Apostoliques, catholiques et protestants ; la célébration en Roumanie de la fête de l’Assomption dans un monastère de Suceava et celle de Grégoire l’Illuminateur dans la cathédrale de Gherla ; les marqueurs d’identité chez les arméniens de Saint-Pétersbourg ; la confrontation de ceux de Californie du Sud à la société américaine et finalement ce que représente l’Église pour ceux qui vivent aux États-Unis.
Ces études donnent incontestablement un aperçu documenté des défis auxquels les Églises arméniennes doivent faire face dans un monde en profonde mutation. Même si le lecteur dispose d’un bon index, il regrettera l’absence d’une présentation de chaque auteur et surtout d’une véritable synthèse d’ensemble, l’introduction se contentant de présenter brièvement la problématique et de résumer succinctement le contenu de chaque contribution.
Michel Mallèvre
Alexander Agadjanian (dir.), Armenian Christianity Today. Identity Politics and Popular Practice, Farnham, Ashgate Publishing Limited, 2014 ; 240 p., £ 65. ISBN : 978-1472412713.
Recension publiée dans la revue Istina, 2015/2-3.