Le protestantisme libéral francophone a sa revue, Évangile & Liberté, avec pour devise : « penser, critiquer et croire en toute liberté ». En 2004 a démarré dans ce périodique la publication d’une rubrique consistant à commenter de manière brève des mots du vocabulaire chrétien, soupçonnés d’être dangereux pour la foi, comme toutes « ces croyances qui se sont surajoutées à la vérité de l’Évangile ».
Dans cet ouvrage, l’éditeur Patrick Van Dieren a rassemblé 125 de ces billets, originaux et déroutants. Car il ne faut pas s’attendre à un dictionnaire du protestantisme libéral : paradoxalement, ces mots sont « revisités » – comme l’indique le sous-titre de l’ouvrage – et les auteurs tentent d’en défendre un usage possible, en prenant la liberté de réhabiliter même ce que le protestantisme libéral a toujours honni.
Parmi les nombreux auteurs on trouve bien sûr les générations successives du monde protestant libéral en France : André Gounelle (qui commente des mots comme « mythe », « littéralisme », « intégrisme », « dogmatique »), Laurent Gagnebin (« morale », « mystère », « liturgie »…), James Woody (« ange », « miséricorde », « fondamentalisme »…) ; et l’on retrouve aussi la signature de Raphaël Picon, décédé trop tôt en 2016 (« tradition », « ciel »…).
Seul le mot « excommunication » est jugé vraiment irrécupérable, tandis que « l’expiation » est frappée d’un « sceau définitif d’infamie ». Mais le vocabulaire catholique trouve grâce aux yeux de Laurent Gagnebin (« messe », « signe de croix », et même « infaillibilité »), tandis que Pierre-Olivier Léchot vient à la rescousse de l’« indulgence », en rappelant la protestation de Luther avec ses quatre-vingt-quinze thèses « destinées à montrer la vertu des indulgences ».
Franck P. Lemaître
Laurent Gagnebin (dir.), Des mots qu’on n’aime pas. 125 mots mal aimés revisités, Paris, Éd. Van Dieren, 2017 ; 158 p. 12 €. ISBN : 978-2-37466-008-0.
Recension publiée dans la revue Istina, 2018/1.