En quelques semaines deux figures marquantes de l’Église orthodoxe se sont éteintes après une longue vie au service de leur patriarcat. Le 6 novembre 2012, le patriarche Maxime de Bulgarie, qui venait de fêter ses 98 ans. Il était le plus ancien, tant par l’âge que par les quarante années de son ministère, parmi les primats des Églises orthodoxes autocéphales. Puis le mercredi 5 décembre, Ignace IV (Hazim), âgé de 91 ans, qui était patriarche d’Antioche depuis 1979. Après la mort du pape Shenouda III de l’Église copte orthodoxe d’Égypte, en mars, puis celle du patriarche Paul de l’Église orthodoxe Tewahedo d’Éthiopie en août, et celle du patriarche arménien apostolique de Jérusalem, Torkom II Manoogian, en octobre, c’est ainsi une génération qui s’efface.

Sans doute les personnalités de ces chefs d’Église étaient-elles bien différentes, comme les situations politiques et ecclésiales très difficiles auxquelles ils eurent à faire face. Faut-il rappeler que, depuis 1991, le Patriarche Maxime était confronté à un schisme lié à l’évolution politique de la Bulgarie, où la presse continue de dénoncer les compromissions de la hiérarchie orthodoxe avec l’ancien régime communiste ? Ou qu’en 1998, le Saint Synode de l’Église orthodoxe bulgare avait décidé de se retirer du Conseil œcuménique des Églises, restant désormais un peu en marge du mouvement pour l’unité même si, quatre ans plus tard, le patriarche Maxime avait reçu le pape Jean-Paul II en visite dans son pays ? Parallèlement, dans une région marquée par la forte emprise de l’Islam, comme le rappelait un récent numéro d’Istina consacré à son Église, le patriarche Ignace IV cherchait les voies délicates d’une présence chrétienne solidaire des peuples arabes tout en s’affirmant comme un rénovateur spirituel et un œcuméniste convaincu.

L’élection de leurs successeurs nous montrera comment ces Églises entendent relever le défi du dialogue avec le pouvoir politique, les autres confessions chrétiennes et la modernité. Telle est déjà la tâche délicate à laquelle doit faire face Amba Tawadros II, élu le dimanche 4 novembre à l’âge de 60 ans 118e « pape d’Alexandrie, patriarche de toute l’Afrique et du siège de Saint Marc » et, depuis le lundi 17 décembre, le métropolite en Europe Jean (Yazigi) élu 158e patriarche grec-orthodoxe d’Antioche et de tout l’Orient, sous le nom de Jean X, à l’âge de 57 ans.

Une autre communion ecclésiale va connaître aussi un important changement avec la nomination, le 9 novembre 2012, du Très Révérend Justin Welby, 56 ans, actuellement évêque de Durham, comme 105e archevêque de Canterbury. Peu après, le successeur désigné de Rowan Williams pouvait prendre la mesure de la crise qu’il devra affronter : contrairement à sa prise de position, le projet sur la possibilité d’ordonner des femmes évêques ne recueillait pas un accord suffisant au Synode général de l’Église d’Angleterre : alors que largement plus des deux tiers de la Chambre des Évêques et de la Chambre du Clergé votaient en faveur du projet, six voix manquaient dans celle des Laïcs.

Quelques semaines avant ces événements, du 7 au 28 octobre, à Rome s’était tenu le synode des évêques catholiques sur le thème de la nouvelle évangélisation. On aurait pu espérer un appel vigoureux à rechercher avec d’autres chrétiens comment faire résonner autrement et plus efficacement le message évangélique. Seulement un paragraphe du message (§ 8) et l’une des propositions des pères synodaux (n° 52) traitent de l’œcuménisme, surtout pour rendre grâce de la présence de délégués fraternels.

Parmi ceux-ci, il convient sans doute de remarquer trois personnalités du monde protestant évangélique : le Pasteur pentecôtiste Lamar Vest, président de la Société biblique américaine, le Rév. Geoffrey Tunnicliffe, Secrétaire général de l’Alliance évangélique mondiale, et le Rév. Timothy George, Doyen de la « Beeson Divinity School » à l’Université de Samford, qui, au nom de l’Alliance baptiste mondiale, a rappelé que l’œcuménisme n’est pas une fin en soi mais doit être au service de l’évangélisation.

Dans la ligne de cette ouverture de la « table œcuménique », et poursuivant notre exploration des différentes confessions chrétiennes, Istina est heureux d’offrir à ses lecteurs un numéro exceptionnel sur la théologie pentecôtiste. Exceptionnel parce que dressant un état des lieux sans équivalent en français, grâce à la collaboration de quelques unes des personnalités pentecôtistes « classiques » les plus remarquables du monde anglo-saxon. Ainsi, les trois premiers articles offrent des présentations d’ensemble complémentaires de cette théologie en forte évolution, tandis que les deux derniers présentent des aspects de la recherche en cours sur des sujets particulièrement sensibles : le baptême dans l’Esprit et le rapport aux religions non-chrétiennes.

Sans doute aurions-nous pu proposer des contributions traitant de l’eschatologie ou de la guérison, sujets qui occupent aussi une place importante dans la pratique et la réflexion pentecôtistes. Malgré ses limites, nous espérons que ce dossier permettra à nos lecteurs de découvrir que les pentecôtistes ne boudent pas la réflexion universitaire et qu’il encouragera les représentants francophones de cette sensibilité à quitter une certaine frilosité, certes explicable par des urgences pastorales, pour s’engager eux aussi dans la recherche et le dialogue. Il y a sans doute là aussi à profiter d’un changement de génération !

Istina