En 2018, la Fédération luthérienne mondiale [FLM] a publié une présentation officielle de sa compréhension de l’unité chrétienne. Fruit d’une enquête auprès de ses Églises membres, et rédigé par un groupe de huit théologiens de plusieurs continents, ce document « clarifie ses principes œcuméniques » dans une première partie, puis formule six engagements précis, la famille luthérienne se disant « résolue à servir l’unité des chrétiens partout dans le monde ».
On saluera ici le désir de prendre en compte les démarches œcuméniques dans leurs différentes facettes : le dialogue théologique bien sûr, mais aussi le plaidoyer commun des Églises pour des questions sociales, le partage de la diaconie ou de la vie spirituelle et liturgique…
Comme d’autres communions mondiales d’Églises, la FLM propose son modèle d’unité interne – la diversité réconciliée – comme paradigme des relations entre les confessions chrétiennes. On pourra toutefois regretter que le terminus ad quem du cheminement œcuménique, qualifié de « communion ecclésiale », ne soit pas vraiment défini, le document se refusant à en indiquer les « caractéristiques précises ». Par ailleurs le catholique, soucieux d’un ministère de communion pour l’Église universelle articulé avec le siège épiscopal de Rome, s’interrogera sur le modèle de « communion polycentrique » ici mis en avant.
Si la diversité est souvent prônée dans ce texte, on y reconnaît de manière honnête qu’elle peut parfois être néfaste. Ainsi, faisant le constat d’une variété de concepts et de l’absence d’une terminologie commune d’un dialogue interconfessionnel à l’autre, les rédacteurs du document estiment que cette « diversité croissante de langages […] peut devenir un obstacle aux progrès dans l’œcuménisme ». De même, on perçoit une tension entre le souhait de respecter les spécificités de chaque continent – « les approches œcuméniques appréciées dans un contexte peuvent très bien ne pas s’adapter à un autre » – et le regret exprimé que les relations œcuméniques « aboutissent rarement à des accords écrits » dans l’hémisphère sud.
On sera enfin attentif au statut du texte. Il formule des propositions et des orientations [guidelines], mais pas des « directives », comme la version française de la préface du secrétaire général Martin Junge le laisse penser. En raison même de la nature de l’unité entre les Églises luthériennes, ce document international garde un caractère plus incitatif que prescriptif.
Franck P. Lemaître
Fédération luthérienne mondiale, Les engagements de la Fédération luthérienne mondiale pour un cheminement œcuménique vers la communion ecclésiale, Genève, Fédération luthérienne mondiale, 2018 ; 36 p. ISBN : 978-2-940459-95-7.
Recension publiée dans la revue Istina, 2019/4.